Au milieu du mois d’octobre, le Ministre délégué chargé des Comptes publics, Gabriel Attal, confirmait devant les parlementaires l’interruption prochaine du dispositif Censi-Bouvard, ce mécanisme d’investissement locatif qui permet aux contribuables français, depuis 2012, d’obtenir une réduction d’impôt dans certaines conditions. L’AIRES a tenu a adresser une lettre au Ministre, pour exprimer son incompréhension.

Paru dans Universités & Territoires n° 159

Jeudi 13 octobre 2022, à l’Assemblée nationale, lors des discussions sur l’amendement 332 du Projet de loi de finances pour 2023, Gabriel Attal a confirmé la nouvelle. En effet, le Ministre délégué auprès du Ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle, chargé des Comptes publics a alors déclaré : « Le Censi-Bouvard s’arrête à la fin de l’année, et (…) nous avons décidé de ne pas le prolonger. » Ainsi, a-t-il indiqué aux députés socialistes et apparentés concernés : « Votre amendement est satisfait et sans objet. »

Une lettre au Ministre

Cette annonce a fait réagir l’Association interprofessionnelle des résidences étudiants et services (AIRES), qui depuis 1994 représente les opérateurs et gestionnaires de résidences services pour étudiants, en regroupant les principaux acteurs de la profession et en informant les pouvoirs publics nationaux et locaux, ainsi que tous les milieux socio-économiques sur l’ensemble des aspects professionnels, sociaux et économiques de cette activité. Avec plus de 200 000 logements pour étudiants, elle représente un parc équivalent à celui des Crous.

Dans un courrier adressé à Gabriel Attal, l’association lui a fait part de « sa profonde incompréhension, et du désarroi pour la vie étudiante dans notre pays » qu’a semé cette annonce au sein des professionnels du secteur. Dans ce document, l’AIRES revient plus spécifiquement sur trois points :

« Tout d’abord, sur la forme, nous sommes surpris que le rapport de la Mission d’évaluation du dispositif fiscal Censi-Bouvard, qui permet de soutenir l’investissement dans le secteur des résidences-services – dont celles destinées aux étudiants -, rapport qui avait été confié le 16 novembre 2021 à l’Inspection générale des finances (IGF) et au Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et qui devait être rendu avant le 15 février 2022, n’ait pas été remis aux parlementaires ni rendu public avant la décision.

Par principe, le travail d’une mission et la publication de son rapport – et cela, quel qu’en soit le contenu, les orientations et les propositions suggérées – devrait toujours être rendu public avant la décision, afin d’éclairer la prise de décision. Nous connaissons votre sens de la mesure et votre attachement au bon fonctionnement de notre démocratie, et vous êtes sans doute en accord avec nous sur ce point de principe. Par ricochet, nous avons tendance à penser que si vous aviez lu et entendu nos arguments – qui ont dû être retranscrits dans le Rapport d’évaluation non publié -, votre décision n’aurait peut-être pas été la même.

Quid des étudiants ?

Ensuite, cette annonce donne le sentiment que la décision a été prise uniquement sur la base des niches fiscales et de la crise des EHPAD. Ne devriez-vous pas l’examiner à travers le prisme des territoires et des étudiants ? Les aides fiscales de l’Etat auprès des particuliers contribuent à l’égalité territoriales des conditions d’études des étudiants. Du point de vue du développement territorial de l’enseignement supérieur, cela a historiquement permis de produire des résidences étudiants dans des villes où le Crous ne souhaitait pas s’installer – comme Fréjus, Saint-Raphaël ou encore Bastia.

Plus récemment, nous constatons que les fonds d’investissement publics ou privés privilégient toujours les métropoles, au détriment des villes moyennes. Force est de constater que les investisseurs «en bloc» ne se ruent pas pour investir à Limoges ou Nevers et qu’alors, très souvent, l’épargne des particuliers – notamment avec le Censi-Bouvard – constitue le seul moyen de faire sortir de terre une résidence pour étudiants.

Enfin, cette annonce sème le désarroi chez les professionnels, au vu des enjeux sociétaux concernant notre jeunesse. L’offre de logements pour étudiants est structurellement insuffisante ; elle ne permet d’accompagner ni la démocratisation de l’enseignement supérieur, ni les nouvelles mobilités que l’on connaît (avec le succès d’Erasmus ou celui de l’apprentissage dans le supérieur). Force est de constater que le nombre de constructions ne suit pas la courbe de la démographie et ne permet donc pas de rattraper le retard. »

Fin du Censi-Bouvard, donc, et Plan 60 000 sans bilan ni perspectives… A la veille des septièmes Rendez-vous du logement étudiant (RDVLE), la politique du logement étudiant est en effet rendue, pour les acteurs de la profession, plus que jamais difficilement compréhensible…n

contact@aires.fr

 

Le rapport d’évaluation du Censi-Bouvard vient d’être rendu public le 7 novembre. « . La réduction d’impôt Censi-Bouvard ne semble pas nécessaire puisque l’investissement des particuliers bénéficie déjà du régime favorable de la location meublée non professionnelle (LMNP). Pour ces différentes raisons, la mission recommande de ne pas proroger le dispositif Censi-Bouvard au-delà du 31 décembre 2022. »

Voir le rapport